Le Soleil de Minuit de Karina Bond ou quand la mode devient sculpture vivante

London Fashion Week, Freemasons’ Hall | Septembre 2025

Backstage au Freemasons’ Hall, Karina Bond assemble frénétiquement les dernières pièces de sa collection. Autour d’elle, des fragments dorés, des disques translucides, des structures qui ressemblent plus à des artistiques qu’à des vêtements. « Voyez-vous, ne n’ai pas d’idée : je tiens un stylo qui dessine pour moi » me lance-t-elle avec un large sourire, tenant en main un stylo 3D comme on tiendrait un pinceau. Et certains de ces stylos n’ont même pas de source d’energie, rajoute-elle, il suffit de les tenir en main. »

Nous sommes le samedi 20 septembre 2025 et sa collection « Midnight Sun »

— « Soleil de Minuit » — va défiler devant le public de la Fashion Week londonienne pour la troisième année. Ce qu’elle s’apprête à exposer ne ressemble à rien à ce qu’on a l’habitude de voir sur les podiums !

Apparaît une première silhouette : structure mobile défiant les lois de la gravité.

« Comme vous pouvez le voir, c’est le stylet qui crée le dessin » me lance-t-elle avec un large sourire, un stylo 3D dans la main, comme on tiendrait un pinceau.

« Certains n’ont même pas de source d’énergie ; il suffit de les tenir dans sa main. »

C’est samedi 20 septembre 2025, et dans quelques heures, « The Midnight Sun », sa collection printemps-été 2026, va défiler devant le public de la Fashion Week londonienne. Diplômée de Central Saint Martins, Karina entre dans sa troisième année à la tête de sa marque éponyme. Et ce qu’elle s’apprête à montrer n’a rien à voir avec ce que l’on voit habituellement sur les podiums.

Apparaît une première silhouette : authentique sculpture dotée d’une mobilité aérienne qui semble défier les lois de la gravité. Autour de moi, le silence s’installe, puis un murmure d’étonnement parcourt l’assemblée.

S’avance alors la pièce maîtresse, « Rose du Désert », une robe composée de plus de cinq mille disques dessinés à la main, inspirée des grains de sable cristallins du désert. Elle scintille, ondule, respire presque sous les projecteurs. Aucun tissu ne pourrait créer un tel effet.

« A chaque nouvelle saison, je tente de nouvelles techniques et change ma manière de concevoir la création » me confie-t-elle ; « je cherche à me débarrasser de la machine-à-coudre et à réinventer.

Cette recherche perpétuelle d’innovation n’est pas du spectacle pour le spectacle. Chaque pièce est dessinée à la main avec des stylos 3D utilisant des filaments biodégradables. Vingt et une silhouettes qui brouillent la frontière entre Haute couture et Art contemporain. Dans une ère où l’intelligence artificielle génère des images de mode en quelques secondes, Karina Bond fait le choix radical de l’artisanat futuriste. 

Sur le podium, un ensemble doré deux pièces évoque une armure solaire, ses contours hérissés captant la lumière comme des antennes célestes. Vient ensuite une robe aux franges translucides qui ondulent.

Les pièces en treillis épousent les corps avec cette tension fascinante entre douceur végétale et précision architecturale. Organique et mécanique. Fragile et fort.

« An extra terrestrial », sourit Karina quand je lui demande de décrire sa collection. Extraterrestre … un mot qui sonne juste. Ces créations viennent d’ailleurs, d’un futur possible que Karia matérialise sous nos yeux.

Pour la première fois, elle s’aventure au-delà du vêtement. Des sacs imprimés en 3D, ajoutent une dimension interactive. En collaboration avec Vicki Sarge, elle présente aussi des bijoux dans lesquelles les pierres imprimées en 3D épousent le

métal raffiné, créant des pièces qui semblent sorties d’une cérémonie rituelle futuriste.

Mais ce qui rend le travail de Karina Bond véritablement captivant, c’est son refus absolu du compromis. « You have to adapt to everything. There’s no opening. It’s just done. Your turn », me dit-elle avec cette détermination tranquille qui la caractérise.

Ses vêtements ne sont pas pensés pour être produits en masse. Ils existent parce qu’ils doivent exister. Point final.

Quand Karina Bond apparaît pour saluer sous les applaudissements, je réalise que nous venons d’assister à quelque chose de rare. Pas simplement un défilé de mode, mais une déclaration d’indépendance créative. Une preuve que l’innovation véritable naît de la rencontre entre vision artistique, maîtrise technique et intégrité absolue.

« The Midnight Sun » porte bien son nom. C’est un soleil qui brille dans l’obscurité, qui illumine des territoires que nous ne savions pas pouvoir explorer. La mode de demain, créée aujourd’hui, à la main et odisque.          

Dans les couloirs du Freemasons’ Hall après le show, les conversations bruissent. Mais une chose est certaine : Karina Bond crée pour ceux qui croient encore que la mode peut être à la fois un Art, une Science et une Révolution.

Et ce soleil de minuit continuera de briller longtemps après que les projecteurs se seront éteints.